Histoire du fils de Marie-Hélène Lafon
📚 Le Treizième roman de Marie-Hélène Lafon est un livre de très grande tenue. Tenue du style et d'une langue « distinguée », comme une fine dentelle littéraire, qu'elle nous offre en une douzaine de courts chapitres, autour d'autant de dates qui marquent l'histoire de deux familles sur un siècle, avec ses drames et ses secrets, ses blessures et ses brisures au fil du temps comme un roman aux allures d’échographie du passé.
Ce dépliement progressif, Marie-Hélène Lafon le construit dans le désordre, mêlant les chronologies, façon puzzle, dans une langue ramassée, puissante.
Ici, ce sont les hommes qui s’interrogent sur leurs origines, dès lors qu’ils deviennent eux-mêmes pères. Des hommes aidés par des femmes généreuses, sensibles et curieuses : des personnages féminins dont la bonté est manifeste. C'est d'ailleurs peut-être à cet endroit que je m'autoriserais un regard critique. Les personnages sont pour beaucoup enveloppés d'une image où « la bonté manifeste » est un peu trop manifeste. Bonté, empathie et compréhension s'articulent dans un monde bien « tenu » comme le style de l'auteure. Seuls les parents d'André dénotent dans ce bain de jouvence familial et en particulier Gabrielle (la mère impénétrable, solitaire et silencieuse) dont l’existence ne se laisse réduire à aucune interprétation. C'est le personnage le plus complexe de ce récit ; cette « mère à double fond » a traversé l’existence de tous sans jamais rien laisser voir ou sentir de ses désirs et de ses choix, dans « des précipices glacés de solitude ».
Son « irréductible volonté d’indépendance », fait d’elle le personnage le plus imposant et le plus puissant et nous semble constituer le centre du récit, et sa véritable énigme...