J'avais été emballé par le premier (Goncout 2013), un peu déçu par le second et j'ai mis du temps à m'investir dans le dernier de cette trilogie. Mais une fois dedans (avec le temps, pour lire vraiment), je me suis laissé prendre par ce roman feuilleton, roman populaire ambitieux et de qualité qui offre une vision très cinématographique du genre.

Lemaitre a l'art de mêler humour et sens du tragique, ce qui donne des allures de chevauchée fantastique à cet ouvrage. Et ce n'est pas simple de donner ce sentiment de chevauchée fantastique quand il est question de décrire la débâcle de l'armée et du peuple français en 1940. Ça m'a fait penser à « Suite française » d'Irène Nemirovski qui traquait déjà avec une beauté infinie les innombrables petites lâchetés et les fragiles élans de solidarité d'une population en déroute.  Ce n'est pas une découverte : Lemaitre a du style, du souffle avec un vrai rythme, c'est épique et très visuel. Je ne serai pas surpris que « Miroir de nos peines » deviennent aussi un film. L'auteur qui a une vraie sympathie pour ses personnages sait merveilleusement bien leur donner de la chair alors qu'ils sont ballotés dans le flot de la débrouille nécessaire à la survie de chacun. Des personnages attachants même s'ils sont pour la plupart peu recommandables. Un livre donc à la fois émouvant, amusant qui tire le fil de plusieurs histoires parallèles qui aboutissent au bout des 500 pages dans un lieu surréaliste qui se trouve être celui vers lequel convergent tous les protagonistes de cette rocambolesque histoire.